L'Espagne a été envahie par plusieurs peuples. Elle a aussi connu la domination d'une église catholique puissante. Ces faits ont influencé les domaines de l'architecture, de l'art, de la littérature et de la musique, d'où leur richesse et leur variété.
Histoire de la littérature espagnole, collectif (Fayard, 1993-1994). La Langue espagnole, B. Darbord, B. Pottier (Nathan, 1988). Ecrits sur la musique et sur les musiciens, M. de Falla (Actes Sud, 1992). Greco : un peintre extravagant, Fernando Marias (A. Biro, 1997). Goya d'or et de sang, Jeanine Baticle (Gallimard découverte, 1986). Pablo Picasso, Ingrid Schaffner (La Martinière, 1999).
L'architecture
Les Romains, à l'exception de quelques voies et aqueducs, n'ont pas laissé de traces inoubliables. Les Wisigoths christianisés du royaume de Tolède construisent des églises. Leur préférence architecturale va vers le style de l'Eglise d'Orient - croix grecques, voûtes et sculptures monumentales. Cette influence orientale va se perpétuer avec l'arrivée des Arabes.
L'influence orientale
C'est l'Andalousie, al Andalus, qui va voir se développer un art arabe qui reste à ce jour inégalé. Abd al-Rahman Ier construit la grande mosquée de Cordoue. La structure du bâtiment s'inspire de celle de la mosquée de Damas et d'Al-Aqsa, à Jérusalem. Elle s'en distingue par une superposition audacieuse des arcades et un jeu de couleurs produit par le mélange des pierres et des briques. La Giralda de Séville demeure un autre exemple du raffinement de l'art mauresque. L'Alhambra de Grenade marque l'achèvement de l'art hispano-mauresque, avec ses fameux jardins andalous à la végétation foisonnante et aux nombreuses fontaines. Les Arabes garderont une influence avec les mudejars, ouvriers formés par eux, qui se mettent au service des rois chrétiens.
L'avancée de l'architecture chrétienne
La fin du Moyen Age voit l'art mauresque s'immobiliser. Dans le même temps, suite à l'avancée chrétienne, églises et cathédrales s'élèvent. En Catalogne, un gothique massif s'impose. L'architecture crée un nouvel espace dans les églises : la nef unique, à laquelle s'adjoignent des chapelles latérales. La Castille et l'Andalousie, encore faibles, voient peu à peu des architectes étrangers bâtir des édifices très distincts. La cathédrale de Léon s'inspire de celle de Reims ; celle de Séville, construite plus tard, sera germanique. L'art hispanomauresque se retrouve dans la synagogue de Cordoue et de l'Alcázar de Séville. Sous les rois catholiques, il n'existe pas d'unité de style. Du gothique, on passe au roman, via l'art plateresque. Parfois on mélange les trois, comme dans la cathédrale de Sigüenza, en Castille. Cette période bénéficie du formidable apport des richesses de l'Amérique. Hormis les châteaux des nobles, l'effort de construction est surtout mis au service de la religion. Jusqu'à la fin du XVIIIe siècle, les architectes, comme les peintres, mettent leur art au service exclusif de la gloire de Dieu. Le baroque fait son entrée. La fin du XIXe siècle connaît une légère percée de l'art nouveau. Cela est surtout visible à Barcelone, entre autres avec la Sagrada Familia et la casa Mila, de Gaudí. Ce style se retrouve dans les palaces de la côte nord, dont la construction s'échelonne entre la fin du XIXe siècle et l'entre-deux-guerres. Depuis, l'Espagne voit le style de ses constructions s'uniformiser avec les autres pays d'Europe. Mêmes styles, mêmes matériaux. Un des « maîtres bâtisseurs » contemporain est le Barcelonais Ricardo Bofill, à qui l'on doit, notamment en France, le quartier néoclassique d'Antigone, à Montpellier.
La peinture et la littérature
Dans ces domaines, la religion, à travers le Conseil de l'Inquisition, a longtemps exercé une forte influence. C'est seulement à partir du XVIIe siècle qu'apparaît une école réaliste libérée de la religion. Le XXe siècle voit la peinture espagnole rejoindre l'école moderne. La littérature espagnole plonge ses racines dans l'Espagne musulmane. Elle va conter les grandes étapes de la Reconquista. Au siècle d'or, c'est l'explosion de l'expression théâtrale. C'est une période d'influence italienne. Le XVIIIe siècle sera français. C'est avec le romantisme que renaît une inspiration typiquement nationale. Elle se confirme au XIXe. La fin du XXe, avec l'avènement de la démocratie, connaît une littérature réaliste, en particulier le roman noir. Federico García Lorca, surnommé le poète des gitans pour leur avoir consacré différents poèmes comme El Cancionero gitano, fut l'un des auteurs espagnols les plus connus au monde.
La peinture
La première oeuvre connue remonte à la préhistoire. Ce sont les célèbres bisons d'Altamira. Depuis, la peinture espagnole a accompli un long chemin. L'art religieux du Moyen Age montre des scènes réalistes, comme le David contre Goliath du maître Tahull, en 1123. L'école aragonaise a le souci du détail. Bartolomé Bermejo, dans son Santo Domingo de Silos, peint le moindre détail de l'habit sacerdotal. Après une période sans grand reflet, le XVIe siècle sera brillant. Le Greco en est l'incontournable vedette. Ses tableaux, le Martyre de saint Maurice, la Crucifixion et la Résurrection en restent les témoins. A Valence, Ribalta allie réalisme et mysticisme. A Cordoue, le moine Valdés Leal pousse le réalisme à l'extrême en peignant des cadavres rongés par les vers. Au XVIIe siècle, Murillo, Velázquez et Zurbarán dédaignent ces excès. La recherche artistique se porte sur les couleurs et la lumière. Les oeuvres restent très inspirées par la religion, mais s'intéressent également à la société civile, comme le montrent par exemple les Fileuses ou les Mangeurs de pastèques et de raisin. Le XVIIIe siècle est le siècle de Goya. Ses oeuvres, Dos de Mayo et Tres de Mayo, sur l'occupation napoléonienne, expriment son amertume d'un monde qui vire au cauchemar. Le XXe siècle voit l'explosion de l'art moderne avec Picasso et son Guernica,Miró et Salvador Dalí.
La littérature
En 1140 paraît le Cantar de myo Cid, une chanson de geste qui magnifie la Reconquête, en contant l'épopée du Cid Campeador. Cet esprit national caractérise les trois siècles suivants. Le gros de la population étant analphabète, écrire reste le privilège des nobles. Alphonse X le Sage rédige des livres de poésie, d'histoire, d'astronomie et de droit. L'imprimerie favorise la diffusion d'une littérature d'inspiration très « hispano-espagnole ». Romances, épopées et tragi-comédies, comme le Calixte et Mélibée de Fernando de Rojas, en 1499. Le siècle d'or voit fleurir les oeuvres théâtrales. Lope de Vega laisse 470 pièces ; Guilhem de Castro refond l'épopée du Cid ; Cervantes écrit son Don Quichotte de la Mancha et les Nouvelles exemplaires. Le XVIIIe siècle est romantique mais d'inspiration étrangère. L'auteur marquant est Benito Pérez Gáldos, qui publie des romans historiques, tel les Episodes nationaux. Le XXe siècle, lui, est marqué par l'oeuvre de Federico García Lorca, poète fusillé par les nationalistes. La littérature contemporaine donne dans le réalisme social, avec des auteurs comme Vázquez Montalbán.
La musique, le folklore et le cinéma
Les trois sont influencés par la dualité espagnole, la sensualité tragique andalouse et l'austérité castillane, ainsi que par la poésie et la danse héritées de la musique orientale. L'Espagne résonne de moult chants car les Espagnols sont de vrais chanteurs.
La musique
L'Andalousie est la plus connue avec son fameux flamenco, chant déclamatoire, souvent tinté de tristesse, et sa musique arabo-andalouse, qui maintient les liens avec le monde oriental. Chaque région possède son propre chant - jota ou habaneres par exemple - comme marque de sa personnalité. Dans le répertoire classique, le XXe siècle a vu trois compositeurs acquérir une renommée mondiale : Albéniz, Granados et Manuel de Falla. La musique chante également la lutte du peuple, avec Paco Ibáñez.
Le folklore
Il est lui aussi l'expression des sentiments du peuple. Ses danses, très liées à la musique, en sont l'illustration. Muñiera galicienne, jotas d'Aragon et de Valence, sardane catalane, zotziko basque et sévillanes andalouses... Chaque fête est l'occasion de se joindre à la danse.
Le cinéma
La grande référence reste Luis Buñuel, célèbre pour son anticonformisme et sa peinture féroce des rigidités de la société espagnole et de la religion. Adepte du surréalisme, il réalise son premier grand succès, Un chien andalou, en 1926, avec Salvador Dalí. Libéré par la chute du franquisme et l'avènement de la Movida, le cinéma contemporain peint la société espagnole actuelle avec humour et parfois cruauté. Ses deux principaux représentants sont Carlos Saura (Cría cuervos) et Pedro Almodóvar (Tout sur ma mère, Parle avec elle, Volver). Par ailleurs, l'Espagne, avec le festival international du film de San Sebastián, dispose d'une manifestation qui se place parmi les cinq plus importantes du monde.